Le collier de pierres

Le 26 janvier 1853, le Conseil Municipal de Paris « vote une somme de 600 000 francs pour l’acquisition d’un collier de diamants » destinée à Eugénie de Montijo, espagnole et alors comtesse de Teba, à l’occasion de son mariage avec l’Empereur Napoléon III. La future impératrice, ne souhaitant pas que son premier geste de française fut de coûter au peuple français, refuse le collier et exprime le souhait qu’avec cet argent, soit créé « un établissement d’éducation gratuite pour les jeunes filles pauvres ».

« Monsieur le Préfet,

Je suis bien touchée d’apprendre la généreuse décision du Conseil Municipal de Paris qui manifeste ainsi son adhésion sympathique à l’union que l’Empereur contracte. J’éprouve néanmoins un sentiment pénible en pensant que le premier acte public qui s’attache à mon nom au moment de mon mariage soit une dépense considérable pour la Ville de Paris. Permettez-moi donc de ne pas accepter votre don, quelque flatteur qu’il soit pour moi, vous me rendrez plus heureuse en employant en charité la somme que vous aviez fixée pour l’achat de la parure que le Conseil Municipal voulait m’offrir. Je désire que mon mariage ne soit l’occasion d’aucune charge nouvelle pour le pays auquel j’appartiens désormais et la seule chose que j’ambitionne, c’est de partager avec l’Empereur l’amour et l’estime du peuple français.

Je vous prie, M. le Préfet, d’exprimer à votre Conseil toute ma reconnaissance et de recevoir pour vous mes sentiments distingués.

Eugénie, Comtesse de TEBA.

Palais de l’Elysée, le 26 janvier 1853 »


Le 28 décembre 1856 est alors inauguré l'Orphelinat du Faubourg Saint Antoine, œuvre de l'architecte Jacques Ignace Hittorff, situé sur le site de l'ancien marché à fourrages du Faubourg Saint Antoine, dans le XII
ème arrondissement de Paris. Paris doit notamment à Hittorff, architecte de la Ville et du gouvernement, l’église Saint-Vincent-de-Paul, la gare du Nord, le Cirque d’hiver, et les aménagements de la place de la Concorde, des Champs Elysée, et du bois de Boulogne.

En hommage au geste généreux de l'Impératrice, l'architecte donne aux bâtiments la forme d'un collier. L’établissement ouvre ses portes le 1er janvier 1857. L’œuvre est confiée aux Sœurs de la Charité de Saint-Vincent de Paul qui resteront présentes sur le site jusqu’en 1978.


Dès la création de l’institution, le nombre de pensionnaires souhaité par l’Impératrice Eugénie passe de 60 à 300. Ce qui en fait l’institution dédiée à l’éducation des jeunes filles la plus importante de celles qui existent en France. L’âge minimum pour y entrer est de 8 ans et les jeunes filles y restent jusqu’à leur majorité. Réparties en plusieurs divisions, les jeunes filles apprennent l’orthographe, la lecture, la dentelle, la lingerie, la couture.

 

Par décret du 1er octobre 1858, l’établissement est reconnu d’utilité publique. L’orphelinat est renommé « Maison Eugène Napoléon », du nom du fils de Napoléon III et de l’Impératrice Eugénie, né en 1856 et qui sera tué en 1879, après la chute du Second Empire, en Afrique australe par les Zoulous. En 1974, la Maison Eugène Napoléon devient la Fondation Eugène Napoléon. Ce sont ces bâtiments qui, encore aujourd’hui, abritent l’œuvre de l’Impératrice.